Mary Robinette Kowal – Sur la Lune

Troisième et dernier opus de la série Lady Astronaut, Sur la Lune de Mary Robinette Kowal est un roman de plus de 700 pages qui est loin de m’avoir séduite. J’avais adoré le premier tome, Vers les étoiles. Déjà beaucoup moins le second, Vers Mars, et pas hyper emballée non plus par le recueil de nouvelles Lady Astronaute. Ce dernier tome a confirmé mon opinion sur l’évolution selon moi très bof de la série. 

4e de couverture

Sur Terre, la situation est critique : le climat se détériore inexorablement et les tensions politiques s’accroissent.

Une coalition internationale espère envoyer le plus de gens possible sur Mars avant que la planète bleue ne devienne inhabitable, mais il est évident que tout le monde ne pourra pas partir. Les manifestations contre le projet de conquête spatiale virent à l’émeute et des tentatives de sabotage des fusées sont mises au jour.

Le FBI craint désormais un attentat de grande ampleur visant la colonie lunaire, première étape vers Mars, ce qui condamnerait définitivement le programme spatial. Nicole Wargin, l’une des premières femmes astronautes, amie d’Elma York, se voit confier une mission en urgence pour le déjouer sur place. Malheureusement, le moment est plutôt mal choisi pour quitter la Terre : son mari, gouverneur du Kansas, envisage de se lancer dans la course à la nouvelle Maison-Blanche. Alors qu’Elma est à mi-chemin de Mars, si Nicole échoue, la survie de l’humanité pourrait être compromise.

Bis repetita

Copier-coller

C’est ce qui m’a le plus gênée : j’ai eu la sensation d’une redite. Et même pas parce que ce tome se déroule en même temps que le précédent et qu’il y a des croisements (qui ne m’ont pas semblé pertinents car pas toujours super exploités – disons que ça n’apporte franchement pas grand-chose).

Non, plutôt parce qu’il se place dans la lignée du tome 2, qui m’avait déjà fait cet effet. On allait certes sur Mars, mais Elma se retrouvait encore et toujours confrontée à ses angoisses, et aux institutions/ordre des choses/époque/individus misogynes/société…, sexistes, racistes etc. Je n’y avais pas vu grand-chose de nouveau à part la vie à bord du vaisseau (et j’avais compris, à cette occasion, qu’on s’y ennuyait pas mal). Ici, même chose, sauf qu’on est témoin du quotidien d’une communauté sur la Lune (et on s’y ennuie autant).

On prend (presque) les mêmes et on recommence

Selon moi, Sur la Lune c’est la même chose. Si Nicole n’est pas Elma, mais c’est son double sur bien des aspects. Tout aussi pénible à mon goût (j’avais fini par trouver Elma particulièrement enquiquinante). Aussi brillante, hyper qualifiée (elle aussi faisait partie de la même unité de pilotes d’élite) et victime de son statut de femme. Mariée à un mec puissant mais gentil. Affublée de maux psychologiques qui lui tordent les entrailles (c’est une manie, les persos féminins angoissés et aux intestins pourris, dans cette saga ? Le vomi ça va bien un tome, mais au 3e j’en ai un peu marre.). Et puis cette même impression de personnage factice, lisse, pas crédible dans sa manière de gérer les événements terribles qu’elle vit. Elle ne dégage aucune émotion, c’est assez spectaculaire d’avoir un personnage autant en carton comme ça.

On retrouve les mêmes bonhommes condescendants et sûrs de leur position, également. Vous me direz : « oui, mais bon, c’était l’époque, aussi ». Oui, d’accord, j’entends. Mais si on n’a rien de plus à dire et à présenter, est-ce vraiment bien la peine de répéter les choses une énième fois ? Là le connard ne s’appelle plus Parker mais, heu, ah, flûte, j’ai même oublié son nom, à ce bougre (déjà). Bref, un Parker 2. Celui qui a la place, le pouvoir, qui dirige… à la place d’Elma – non, flûte, Nicole -, même si celle-ci est 100 000 fois plus qualifiée que lui. (Encore).

Et quel ennuiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii

La Lune, c’est quand même pas waouh

Soyons honnêtes : ce n’est pas l’éclate, la Lune. Quand on n’est pas sur une Lune imaginée style Célestopol, franchement c’est pas folichon, il n’y a rien à faire sur ce caillou tout moche. Alors quand en plus, il y a des coupures de courant tout le temps, des intoxications alimentaires (décidément, c’est une manie) et la polio qui se propage, c’est franchement peu  attirant. J’étais un peu pressée d’en finir et de revenir sur Terre, je dois bien le dire.

Une intrigue réduite à peau de chagrin avec moult facilités scénaristiques

Et puis quel ennui, mazette. Il faut dire que l’intrigue n’est pas hyper élaborée. Complots internationaux, sabotages, ahlala ça va mal ciel on est mal barrés, c’est bientôt la fin du monde, mais non ouf, les astronautes sont des héros. On dirait le scénario d’un film catastrophe américain.

Bon, je suis mauvaise. En vrai il se passe plein de trucs. Un petit sabotage par là (- Hum, c’est louche. – Mais noooon Nicole), un autre petit sabotage par ici (- Là je vous le dis, c’est vraiment préoccupant. – Nicole, cessez cette hystérie) et un vilain gros sabotage là (Je vous l’avais dit que c’était pas normal. – Oui, bon, ça va ! Occupez-vous de ce merdier, Nicole, c’est vous la plus qualifiée, il parait ? Alors faites le ménage.).

Hum, non, en fait, je me suis ennuyée ferme. Et je n’ai même pas frémi une seule seconde face à ces incidents, parce que je savais que sainte Elma – raaah, flûte, Nicole – allait sortir forte et glorieuse (après un petit vomito). Même avec son bras cassé, elle parvient à presque tout faire, Nicole. Parce que c’est une warrior, c’est tout (crédibilité : 0). Des facilités de ce type, il y en a tout au long du roman, jusqu’à la toute fin. Qui m’a d’ailleurs semblé inutile, pas très friande des épilogues « des années plus tard » (qui en plus ici ne surprennent même pas).

Heureusement, le dernier tiers est plus captivant, avec des rebondissements, des événements inattendus, etc. Enfin. En revanche, ça fait long, attendre 500 pages pour se mettre quelque chose sous la dent.

Uchronie bof et contexte mondial bof

Et puis j’ai trouvé dommage le traitement uchronique, qui tend à disparaître un peu. On est tellement le nez dans le guidon des sabotages et incendies etc., qu’on en oublie le fond. j’ai trouvé que ce roman-là perdait son raccrochement à l’origine de la série et à son contexte direct. J’ai eu la sensation d’un roman un peu hors sol, sans consistance derrière.

Il y a bien les chapeaux introductifs de chaque chapitre qui donnent un aperçu de la situation géopolitique, écologique et économique du monde. Mais ils restent selon moi très décoratifs. Il faut dire que le format choisi n’aide pas (des sortes de flashs info). Il en résulte quelque chose de strictement factuel, assez froid, désincarné. A l’inverse de Symphonie atomique, où ces chapeaux donnent vraiment à voir du quotidien, des personnages « réels », qui en tout cas apportent une épaisseur, une émotion; et qui parviennent à dialoguer avec le récit principal, dont on comprend l’importance par ce parallélisme. Or, Sur la Lune n’offre que rarement des croisements entre cette vie de tous les jours et ce qui se passe dans l’intrigue. Et quand le roman le fait, c’est de l’événement pur, là encore sans émotion, ni engagement, ni puissance.

Voilà, c’est ça : l’émotion. Quelque chose que j’ai trouvé complètement absent du roman. Il m’a semblé trop mécanique, comme une recette maintes fois répétée, que l’on ne fait plus que par habitude. Je n’ai pas trouvé d’émotion dans les personnages, ni dans le style, ni dans la narration et le format choisi. Ça manque de panache, ça manque de risques, ça manque de foi, tout ça. Rien ne m’a bouleversée, rien ne m’a interrogée et rien ne m’a décoiffée.

En pratique

Mary Robinette Kowal, Sur la Lune
VO : The Relentless Moon (2020)
VF : Éditions Denoël (Lunes d’encre), 2022 et Folio SF (2024)
Traduction : Patrick Imbert
Autres avis : un retour plus mesuré pour Célinedanaë ; plus mesuré aussi et surtout beaucoup plus argumenté que ma chronique chez Apophis; une lecture qui ne provoque pas l’émotion du premier volume pour L’épaule d’Orion, mais un page-turner qui fonctionne bien; Le maki a beaucoup aimé ce roman et il serait d’ailleurs bien resté sur ce caillou; Anne-Laure a adoré cette saga et j’apprends par sa chronique qu’il y aurait potentiellement 5 tomes (ciel.)

 

Oui, je sais, j’y suis allée un peu fort. Mais je dois quand même reconnaître une qualité à ce roman : il se lit tout seul et ne demande aucun effort intellectuel. Et ça, c’est très bien aussi, parfois, on peut le lire en même temps qu’un autre sans problème, ou alors le caser après une grosse lecture qui nous a remué un peu trop les méninges : repos garanti avant de repartir pour un tour. Je garderai en mémoire le premier tome, Vers les étoiles. Et puis c’est tout. Je suis assez déçue du tournant pris par cette série, je trouve qu’elle s’essouffle… J’espère que l’autrice aura quelque chose de plus consistant et percutant à nous raconter dans les prochains éventuels tomes.

Un commentaire sur “Mary Robinette Kowal – Sur la Lune

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  1. Quand je veux voir mis en pièce (je veux pas pourtant 😭) un livre que j’ai bien aimé, je viens lire ta chronique 😭 Bon en vrai celui-ci a bien des défauts mais je l’avais trouvé chouette à lire j’avais bien aimé le côté huis-clos espionnage sur la Lune.

    Au vu de ta conclusion, j’ai l’impression que tu as quand même envie de continuer ?

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