Gillian Brousse – Spleen cities

Spleen cities est un roman de Gillian Brousse, paru en 2020 aux éditions Noir d’Absinthe. Ce roman faisait partie des extraits reçus pour le Prix des Auteurs Inconnus 2020. Je n’avais pas retenu ce texte dans ma sélection toutefois je m’étais noté de le lire à l’occasion, tant il avait su attirer mon attention. Mais pour la première fois avec un texte de la maison, je n’ai pas accroché.

Synopsis

« La vie de Shelby est chamboulée lorsque Zoé croise sa route. La jeune fille, dont les pensées s’accompagnent d’une bande son mystérieuse, fuit les Youngsters, des bandits de petite envergure un peu trop déterminés à la retrouver.

À cause de cet ouragan aux cheveux roux, le misanthrope ordinaire doit accomplir une mission dont il se serait bien passé.

Pour couronner le tout, nos deux héros se retrouvent mêlés bien malgré eux à la révolte qui gronde entre Novart et Veilam, les deux villes jumelles régies par la décadence et le hasard, et ils risquent fort de brûler en même temps que ces Spleen Cities ».

Un jeu vidéo en mots

Cet aspect se devine dès la couverture signée Amaryan et à la bio de l’auteur en 4ème de couverture. Passionné de cinéma et de jeux vidéo, Gillian Brousse semble avoir transposé ses passions dans un format littéraire.

Un récit d’action trépidant; des personnages plutôt bruts, pris sur le vif, perpétuellement en cavale ou en planque; une écriture tout aussi vive, riche en dialogues et un niveau de langage courant (voire familier); et enfin un décor très urbain dépeint de manière très expressive : j’ai eu la sensation de « lire un jeu vidéo ».

En effet, Gillian Brousse ne décrit pas ses personnages, ni les lieux, ni ne raconte ce qu’il se passe. Non, ses personnages sont là, ils vivent, ils semblent décider seuls quoi faire, quoi penser, et les lieux se découvrent par leurs yeux. Le narrateur semble s’effacer complètement derrière les personnages et l’histoire qui se déroule. La vivacité et la vitesse ressenties m’ont vraiment donné l’impression de vivre l’histoire plutôt que de la lire, comme si je portais un casque de réalité virtuelle.

Sachez d’ailleurs que l’auteur a réalisé, sur la base de son roman, un jeu vidéo d’aventures, dont vous pouvez visualiser le trailer ici. Le jeu est offert pour tout achat du roman papier sur la boutique du site (cf. En pratique).

Des cities cyberpunk

On est pleinement, dans Spleen Cities, dans un roman SF cyberpunk. Le récit se passe après un cataclysme et on a tous les ingrédients du post-apo dans le roman. Un cadre très sombre, une redistribution des populations (cette fois les Nantis sont en-dessous, protégés), des personnages qui errent, cherchant un but et un sens à leur vie, des repères complètement détruits.

Mais plus que du post-apo, c’est du presque-apo; car tout, dans Spleen Cities, est un bordel sans nom. L’univers est complètement désorganisé, chacun tente de trouver sa place avec les moyens du bord, dans un anarchisme complet. Le chaos règne dans les pages de ce roman, à chaque instant. Cela va de pair avec une ambiance particulièrement sombre, poisseuse et désespérée, lugubre. Et surtout teintée d’une violence féroce.

Même les personnages sont à l’avenant : cyniques, désabusés, égoïstes et cupides. D’où la difficulté de les suivre et de les comprendre, tant ils semblent vivre à la seconde. Ils rebattent complètement les cartes de la morale, ce qui très souvent perturbe et déroute.

Les décors sont citadins, parsemés de lumières artificielles qui arrachent les yeux. On en découvre les bas-fonds par la plongée dans les égouts que l’on explore plus d’une fois. Les pouvoirs de Zoé proviennent de son « maestro intérieur » : qu’est-il ? Une sorte d’IA ? On trouve aussi des nanorobots, des casques de réalité virtuelle, des technologies robotiques sophistiquées… Bref, on est dans un monde industriel, qui fait du bruit, beaucoup – et à la musique interne de Zoé répond la construction musicale du roman, partagé entre plusieurs morceaux d’une partition : fugue, coda, rappel… comme pour mieux rythmer l’histoire qui se déroule.

C’est particulièrement bien fait, toutefois il faut réussir à accrocher à un tel univers… ce qui n’a pas été mon cas. Trop sombre, trop vif, trop violent et trop brut pour moi. Et l’esthétique jeu vidéo ne m’attire pas tant que cela.

Des incompréhensions qui demeurent

Au-delà de cette incompatibilité de caractère, on va dire, j’ai eu aussi du mal à comprendre. Déjà les personnages : comme je l’ai dit, leur morale n’est pas la même que la nôtre, il est parfois difficile de comprendre leurs choix et leurs actions. En cela, je ne suis jamais vraiment parvenue à saisir le rôle de Shelby. Je n’ai pas non plus compris Zoé, dont les petits airs de musique font coucou je ne sais pas pourquoi et dont la magie va et vient et repart. D’autres personnages font une apparition dans le texte avant de disparaître, sans vraiment avoir apporté quoique ce soit à l’histoire. C’est notamment le cas de Pun et plus largement des Youngsters, dont finalement je n’ai pas bien saisi les motivations.

Enfin, j’ai manqué de cadre. Moi, j’ai besoin de comprendre où je suis, comment on en est arrivé là, qui est qui, qui fait quoi etc. J’aime me perdre dans un labyrinthe mais après avoir tenté de comprendre les règles du jeu. Mais ici, c’est le bordel dès la première ligne (c’est évidemment fait exprès et très bien réalisé d’ailleurs) et jamais je n’ai pu me raccrocher à des repères. J’ai eu trop de questions sans réponses concernant le contexte, et du coup je ne pense pas avoir bien saisi tous les enjeux autour des deux villes. Idem pour les chapeaux introductifs de chapitres. Je ne suis pas parvenue à saisir l’intérêt de ces pensées et paroles de monarques.

Finalement, je ne me suis pas vraiment perdue, car j’ai rapidement arrêté de vouloir me raccrocher à quoique ce soit; mais ce faisant, je ne me suis jamais pleinement investie dans l’histoire.

En pratique

Gillian Brousse, Spleen Cities

Noir d’absinthe, 2020

Couverture : Amaryan

Autres avis : Retrouvez l’avis de Julia sur le blog Elo-dit. Elle a beaucoup aimé ce roman de SF très riche.

 

Spleen Cities est un roman de Gillian Brousse. Plus qu’un roman, c’est une expérience particulière. Une transposition à l’écrit d’une histoire dont on dirait qu’elle a été pensée pour du jeu vidéo. Il en résulte un texte assez étrange, particulièrement vif, qui dès ses premières lignes bouscule tout. Si vous aimez les jeux vidéos, nul doute que vous parviendrez à vous adapter et à surfer dans les pages de ce roman avec la plus grande aise. Pour ma part, j’ai eu du mal à tout comprendre, à saisir ce qui m’était donné à lire/voir. Malgré tout, je retiendrai toutefois la superbe cohérence d’ensemble et le travail d’écriture qui a permis de rendre ce texte aussi vif et imagé.

2 commentaires sur “Gillian Brousse – Spleen cities

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