Ezéchiel est un roman de Sophie Griselle, paru aux éditions Edelweiss, dans la collection Plumes écarlates. A l’origine, j’ai connu l’autrice sur fanfiction.net, où elle écrivait déjà des textes de qualité. J’ai donc sauté sur l’occasion quand j’ai su qu’elle avait fait publier son roman. J’ai lu ce texte dans le cadre du Printemps de l’Imaginaire Francophone (catégorie La cafetière : un livre qui parle de rêves). C’est un beau pavé de plus de 500 pages, que j’ai lu en une seule journée, complètement captivée par le récit et la plume de Sophie Griselle. Un beau bijou à découvrir, si vous voulez mon avis.
Synopsis
« Avez-vous déjà fait un rêve qui semblait si réel qu’en vous réveillant, vous n’étiez pas sûr de l’avoir quitté ? Le genre de rêve qui s’accroche à vos pas, qui parasite vos émotions, remplit vos pensées d’événements qui ne se sont jamais produits ? Vous est-il déjà arrivé de douter ? «
Cal mène une vie a priori parfaite, en tout cas banale. Lycéen, il est bon élève, choyé par sa mère, fou amoureux de sa petite amie Anna, son amie d’enfance. Mais il commence à faire des rêves. Très réalistes. Toutes les nuits, il est Ézéchiel, le bras-droit armé de Ryu, grand baron de la drogue qui règne sur la ville. Ezéchiel qui semble lui aussi tourmenté, se réfugiant dans la drogue pour s’extirper de ses souvenirs.
Cet Ezéchiel… c’est le sosie de Cal : ils ont le même prénom, honni de Cal, et le même visage. Peu à peu, la frontière entre rêve et réalité se dissipe : comment faire la différence entre les deux ? L’arrivée de cette violoniste de rue dans la vie d’Ezéchiel et de Cal (mais peut-être ne sont-ils qu’une seule et même personne ?) va t-elle lui/leur permettre de comprendre l’origine de ces tourments, et en sortir ?
Un texte dans la ligne éditoriale d’Edelweiss Editions
Cette œuvre figure dans la collection Plumes écarlates, qui réunit les romances. Mais Edelweiss est une maison d’édition qui ne se contente pas de publier de la romance toute simple. Comme indiqué dans la ligne éditoriale, l’accent est surtout mis sur les « intrigues alambiquées », et la complexité des personnages. Les romans d’Edelweiss rentrent difficilement dans les cases traditionnelles. Par ailleurs, il y a une exigence très forte sur la qualité littéraire des textes. Tout ces éléments se retrouvent dans Ezéchiel.
Je ne qualifierais d’ailleurs pas ce texte comme une romance, car ce n’est pas ce qui vient au premier plan, et elle n’est ni classique ni fleur bleue. Au contraire, elle est protéiforme et revêt plusieurs visages. De ce fait, elle est complexe, à l’image de l’intrigue centrée autour de Cal/Ezéchiel. On a donc ici un texte particulièrement riche, où chaque élément s’imbrique avec les autres pour créer un puzzle qui tient le lecteur captivé de bout en bout.
Enfin, il faut effectivement souligner la qualité du texte. On est dans un roman très bien écrit, à la plume soignée, travaillée, riche en vocabulaire et en nuances. Je n’ai pas trouvé une seule faute d’orthographe ni une seule coquille, c’est suffisamment rare pour être noté. Le texte a aussi bénéficié d’un très beau travail éditorial, tant sur la couverture que dans sa maquette, faisant de l’œuvre un bel objet livre.
Sur le fil, entre réalité et imaginaire
Je dois dire que je suis sortie un peu de ma petite zone de confort avec ce texte (vous savez que je ne regarde aucun film interdit aux moins de 10 ans), et les thématiques abordées (violences familiales, drogue) sont difficiles. J’avais quelques craintes aussi, car le thème du rêve ne touche beaucoup. Disons que ce que vit Cal dans les premiers temps m’est très familier. Mais j’ai bien fait, parce que j’ai énormément aimé ce roman.
Ambiance fantastique…
Alors oui, j’ai aimé l’histoire et l’intrigue, mais j’ai encore plus apprécié l’ambiance « entre-deux » tout au long du récit. Cette hésitation constante, entre réalité et étrange ou mystérieux ou encore autre chose. Cal se tient sur cette frontière : ses rêves sont-ils réels ? ou bien rêve t-il plutôt quand il pense être conscient ? Et toutes ces choses bizarres qu’il voit, entend, pressent… sont-elles le fruit de son imagination ? une illusion ? un tour de son esprit ?
Très vite, dans cette ambiance semble t-il tout à fait commune et banale, on sent que quelque chose cloche, mais on ne sait pas quoi. Et Sophie Griselle va nous maintenir dans cette hésitation un bon moment, amplifiant peu à peu les brouillages entre les deux sphères. Elles vont se mêler, se confondre, se rejoindre, se séparer à nouveau, se renverser… C’est vertigineux. Ezéchiel est un roman qui joue sur cette frontière entre imaginaire et réel, plongeant le lecteur dans une ambiance typiquement fantastique, teintée de doutes, d’angoisse et de peur au fur et à mesure que le texte avance.
Je ne veux pas trop en dire ni dévoiler le récit. Disons simplement que cet aspect fantastique est traité de manière atypique dans Ezéchiel, et que Sophie Griselle nous surprend jusqu’à la dernière ligne de son texte, réinterrogeant ce qu’on vient de lire, et ce qu’on pensait en avoir compris. Cette pirouette finale, ce twist inattendu, m’a vraiment beaucoup surprise, et clôt le roman en beauté, sur un très beau point d’orgue.
Un roman captivant et protéiforme
Thriller ? Romance ? Fantastique ? Roman psychologique ?
Ezéchiel est une lecture captivante, qui m’a happée dès les premiers mots. Sans doute parce que je me suis identifiée à ce que vit Cal. Mais encore une fois, difficile de mettre ce roman dans une case. Thriller ? cela me paraît trop facile. Ce n’est pas ce qui est donné à lire ici. Cal mène une vie assez banale, décrite par une écriture semble t-il calme et posée. On sent plus qu’on ne le constate qu’il y a un truc qui cloche, ne serait-ce par cette alternance de temps (passé pour Cal, présent pour Ezéchiel, comme pour mieux brouiller les pistes : quel est la timeline réelle ?). Il y a du suspense mais pas insoutenable, de la tension narrative mais pas extrême. Un roman fantastique donc ? oui, assurément, mais pas entièrement non plus. Un roman psychologique ? Oui aussi, on est dans les tréfonds du subconscient de Cal/Ezéchiel, et c’est tortueux et sombre. Mais ça ne suffit pas non plus. Une romance ? oui, on l’a dit, il y en a, mais elle ne ressemble pas à ce qu’un public de romance pourrait s’attendre.
Alors quoi ? Alors je dirais tout cela en même temps. Un cocktail d’ingrédients provenant de tous ces « genres romanesques », donnant à lire quelque chose de singulier, de protéiforme. La richesse du roman vient aussi de sa solidité. En effet, quelque soit la sphère dans laquelle Sophie Griselle évolue, on sent que chaque élément qu’elle avance est documenté. J’ai particulièrement apprécié son approche des mécanismes du subconscient, un domaine pas évident du tout. De la même façon, l’intrigue autour d’Ezéchiel et Ryu tient vraiment la route, il y a un réalisme du fait des détails apportés (l’organisation d’une mafia autour de la drogue, la façon de penser de Ryu, à la tête du clan…).
Une sortie des limites imposées à la littérature
Enfin, ce que je trouve magistral ici, c’est que l’autrice nous fait apprécier des personnages qui disons-le, sont d’épouvantables ordures. Ryu est un salopard, Ezéchiel un assassin, mais, mais… je me suis attachée à ces personnages. Vous savez comme j’aime que la littérature sorte des rangs. J’ai admiré les talents de penseur de Ryu, la culture étendue d’Ezéchiel alliée à un sang-froid et une absence totale d’émotions. J’ai aimé ses actes de vengeance, et ri de l’incapacité de la police à pincer ces hommes. Enfin, j’ai aimé cette fin de roman, qui propose quelque chose d’atypique. C’est complètement novateur, osé, et franchement ça marche.
Ezéchiel est un roman de Sophie Griselle, à découvrir absolument. C’est une lecture que j’ai adorée. Evidemment, les quelques lectures mitigées passées ont renforcé le plaisir que j’ai eu de lire enfin quelque chose qui me plaisait beaucoup. Mais cela n’enlève rien à la qualité de ce texte, surprenant, extrêmement bien maîtrisé, captivant. Pour moi, c’est un sans faute. Je sais d’ores et déjà que je guetterai les prochaines parutions de l’autrice et que je ne les laisserai pas passer ! Cette découverte m’a aussi donné envie d’explorer un peu plus le catalogue d’Edelweiss Editions, j’ai repéré un ou deux titres qui pourraient bien me plaire.
Ah, tu me donnes encore envie avec ce bouquin !
Je te le recommande les yeux fermés. Il sort des clous, et franchement c’est une réussite ! 🙂
C’était moi, le commentaire. Je sais pas pourquoi, wordpress m’a marqué comme anonyme.
Je m’en suis doutée, comme tu as aimé l’article juste avant ^^ wordpress fait des trucs un peu bizarres parfois !
Super article, c’est malin maintenant j’ai envie d’acheter le livre ^^ !
ah ben mince alors ! je ne suis pas désolée du tout cela dit 😀 je suis ravie si je donne envie de découvrir ce roman et son autrice. Et en plus le livre est vraiment beau… 😉
Comme toutes tes chroniques, tu me donnes envie de le lire (même celles négatives) XD
Je suis contente de voir que tu as aimé ce roman. Comme on en avait parlé, je suivais aussi cette autrice (sur Wattpad) et j’aime son univers très sombre et torturé et sa plume. J’ai hâte de le lire ! 😀
il faut vraiment que j’aille voir ce qu’il se passe sur wattpad ! Si tu aimes ce qu’elle fait, alors tu va adorer ce roman. Il est d’une maîtrise !