KeoT – Conditions Générales d’Usurpation

C’est le plus grand des mensonges sur internet : « j’ai lu et j’approuve les conditions générales d’utilisation ». L’épigraphe de ce roman donne le ton. Sorti il y a deux mois en autoédition, le thriller Conditions Générales d’Usurpation est le premier roman de KeoT. Cette lecture émane d’un service de presse depuis la plateforme Simplement.pro. Je remercie infiniment KeoT pour m’avoir envoyé son roman. J’ai profité du Printemps de l’Imaginaire Francophone pour intégrer cette lecture dans la catégorie Outsphère (autoédition). J’ai globalement bien aimé cette lecture, qui m’a sortie de mes habitudes.

Synopsis

« Alors, c’est comme ça qu’on bascule dans le cybercrime. Un samedi après-midi, en pyjama. »
Depuis que sa bourse d’étude a été refusé, Melissa Allen a v6 s’effondrer tout espoir de carrière chez les géants de la Silicon Valley. Et c’est pas avec ses petits boulots à la tâche qu’elle arrivera à économiser suffisamment pour les filières d’excellence qu’elle vise….
Ce rêve nerd californien refuse sa bourse pour quelques dixièmes de points…. Le monde cherche les problèmes.
Avec un peu de cryptomonnaie investie dans les malwares au marché noir, l’argent est à portée de quelques lignes de commande. Promis, juste de quoi payer ses études.
Au moins, derrière ses terminaux, elle est en contrôle.
Enfin, pour le moment. »

C.G.U : un univers immersif

Allergiques de malware, de hacking et de darkweb : non, ne fuyez pas 🙂

Certes, on plonge dans un monde étrange avec C.G.U, mais on s’y retrouve. Parce que finalement, tout ça c’est désormais notre quotidien. Melissa manie un PC, un téléphone et une clef usb… Bref, rien de sorcier. N’ayez donc crainte, vous parviendrez à suivre l’intrigue. C’est assez facile à comprendre. D’autre part, KeoT parsème son roman (mais sans trop en mettre, juste ce qu’il faut) de notes pour guider le lecteur dans ce monde parallèle.

C’est en effet très immersif. On est plongé dans cet univers technologique et informatique, du début à la fin. Il y a un petit effet huis-clos, d’ailleurs, quand on y pense. Ces personnages mangent, dorment, parlent… techno/internet/réseaux. Des vrais nerds (des geeks +++, asociaux et obsessionnels). La couverture du roman est vraiment parfaite, elle met bien en valeur le décor du roman, sa modernité avec l’écran seule source de lumière. J’ai bien aimé aussi la police très machine à écrire des titres de chapitres. L’ambiance est posée, Big Brother sait tout, voit tout, marchande vos données… C’est un peu flippant, malgré tout.

Conditions Générales d’Usurpation

On est vraiment dans cette logique d’usurpation ici. En cela, le titre sigle détourné est vraiment très bien trouvé. Usurpation informatique d’une part (trojan, mouchards et autres virus qui pourrissent les machines, pompent les données personnelles en se faisant passer par une institution/organisation etc.), et usurpation d’identité d’autre part. Car Mélissa n’est pas ce qu’elle paraît être : M.Davis la considère comme une gentille fille sans problème, mais elle est en fait une hackeuse, qui s’enfonce dans la criminalité et la trahison. Elle ne cesse de jouer un rôle auprès de tous les gens qu’elle rencontre dans ce roman. Un personnage qui joue un personnage… bien joué, non ?

Un style vivant et expressif

La plume de KeoT renforce l’immersion dans ce monde alternatif. C’est Mélissa qui raconte son histoire. On arrive catapultés dans son quotidien, au cœur d’un échange sms avec son cousin Josh. Point de vue interne, utilisation du « Je », langage post-ado, moyens de communication variés : on est visuellement de suite dans le thème.

Le présent est vif, instantané, on vit les choses au même rythme que Melissa. On pourrait s’imaginer à sa place. Mais c’est un présent d’énonciation. On est dans l’action, le dire, moins dans le montrer. C’est parfait dans un format court; dans un roman, ça manque un peu d’épaisseur selon moi. Mais rien de rédhibitoire sur ce plan, d’autant que c’est cohérent avec le style et le point de vue du récit.

Par contre, le langage très courant de Melissa m’a fait plusieurs fois grincer des dents. Pas sa façon de parler d’ado en elle-même, complètement cohérente. Ce sont plutôt les tics de langage qui m’ont fait râler. Les « sérieux », « grave » et pire, « genre » à répétition : ça ne passe pas à l’oral, ça ne passe pas à l’écrit. Une utilisation parfois : oui, normal, tous les gens disent ça. Cela dit, je ne pense pas qu’on aurait perdu en cohérence ni en oralité avec quelques tics en moins. Vous avez aussi le droit de penser que je fais une fixette sur « genre » (mais bon sang de bois, ça veut rien dire et qu’est ce que ça m’énerve d’entendre des gens dire ça !!) !

Une intrigue rapide et trépidante

Encore une fois il règne dans ce texte une cohérence d’ensemble que j’ai vraiment bien aimée : ça va vite. Mais pourquoi ça va vite ? Parce que c’est la magie des réseaux ! Tout se sait, vite, tout se diffuse, vite, sans fil, vous appuyez sur un bouton et hop, c’est parti avant même d’avoir dit ouf !

Par contre, la vitesse a fait que j’ai perdu parfois la logique entre les événements. J’ai besoin d’une cause –> effet dans la suite des choses. Il m’a manqué quelques fois ce chaînon, faisant perdre en crédibilité les événements. J’ai parfois eu la sensation qu’on était davantage dans la succession d’événements juxtaposés que dans le lien logique. C’est le cas du nœud perturbateur, vraiment énorme, il fait l’effet d’une bombe ! Mais il est plié en quelques pages seulement : le suspense haletant n’a pas le temps de s’installer. Je n’ai pas pu ressentir non plus la peur panique, sourde, froide, qu’aurait ressenti n’importe quel individu. En tout cas, je n’ai pas toujours mordu, et ça m’a un peu sortie de l’illusion romanesque. Cela dit, là aussi je pense que ce ressenti variera vraiment selon les profils de lecteurs, et les attentes de chacun.

Dans tous les cas, c’est un premier roman qui présente de sérieux atouts. Quelques points m’ont moins plu, mais certains sont subjectifs, quand d’autres pourront aisément être corrigés dans un prochain roman. J’ai apprécié cette excursion dans un style et un genre qui ne m’étaient pas familiers, et je remercie encore KeoT pour sa confiance.

Conditions Générales d’Usurpation est un roman de KeoT, roman divertissant, original, qui a diversifié ma routine de lecture. J’ai beaucoup apprécié la cohérence d’ensemble intrigue-univers-style-rythme… très travaillée, même si certains détails m’ont moins plu. Ca m’a donné envie de poursuivre ces petits voyages en dehors de mes habitudes et d’aller voir d’un peu plus près le travail de l’auteur sur le format court. Et de guetter ses prochaines sorties. Car c’est un auteur à suivre, assurément.

4 thoughts on “KeoT – Conditions Générales d’Usurpation

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  1. Je suis intriguée bien que le thème ne me parle pas plus que ça. Le format court permet au moins de ne pas s’engager dans une longue durée si jamais.

    1. ça reste un roman malgré tout, même si effectivement ce n’est pas très long, et comme c’est rapide on ne se rend pas compte de la longueur.
      Mais oui, j’ai trouvé que l’auteur avait une plume particulièrement adaptée au format court. Il a d’ailleurs commencé dans ce domaine.

  2. Coucou ! je le suis sur twitter mais je n’ai jamais eu l’occasion de lire un de ses écrits. Tu me donnes très envie avec celui-ci.

    1. Il gagne à être découvert, en effet, malgré les quelques défauts. Je trouve que c’est un bon premier roman, avec pas mal de choses intéressantes.

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