Et un nouveau Ariel Holzl, un ! Pax automata, son dernier roman jeunesse dans l’univers steampunk, cette fois. Jeunesse ? Moi ? Hé oui. Mais pas n’importe quel jeunesse. Ariel Holzl est un des rares auteurs que je lis les yeux fermés. Parce que j’adore sa plume, que je trouve d’une richesse incroyable, et parce que je trouve qu’il sait parfaitement doser ses univers et ses histoires pour les adapter au public visé. Lire un Ariel Holzl, c’est pour moi une promesse de régal. Alors, est-ce que Pax Automata a satisfait mes attentes ?
Synopsis
« 1889. L’empereur Napoléon III, grand vainqueur de Sedan, s’apprête à inaugurer l’exposition universelle organisée dans un Paris grouillant d’automates en tout genre.
Lors de la parade d’ouverture, Philémon de Fernay, jeune élève de saint-Cyr, a le privilège de piloter le Zéphyr, le nouvel aéronef crée par Clément Ader.
Mais tout déraille lorsque l’engin volant s’écrase sur la salle des machines et la pulvérise. Sous les gravats, Philémon découvre alors le corps d’un enfant automate aux traits particulièrement réalistes.
Quel fabricant a bien pu enfreindre la loi principale de la Pax automata qui interdit la conception d’automates ressemblant à des humains ? Même Zélie, la romanicielle et mécanographe hors pair, n’a jamais rien vu de pareil ! Plus mystérieux encore…Une fois activé, l’enfant automate est capable de faire exploser n’importe quel mécanisme à proximité. Serait-ce une arme secrète dirigée contre l’Empire ? »
Un récit un peu trop simple
Pax Automata est un roman d’aventures. Efficace, mais classique. Il y a les gentils, les méchants, ceux qu’on ne pensait pas gentils mais qui en fait le sont. Un complot terrrrrrible. Des héros, jeunes. Le roman fait la part belle aux rencontres, à l’amitié, et aux premiers émois amoureux. Des politiciens, des gens de pouvoir, des révolutionnaires. Rien de très extraordinaire dans le déroulé ni le rôle de chacun. C’est linéaire, précis, ça va droit au but.
Mais c’est presque trop simple. Trop bien huilé. Il n’y a pas de fausse note, mais il n’y a que très peu de surprise finalement dans Pax Automata. Aucun retournement décoiffant, aucune prise de risques. Le récit en lui-même, le complot, les péripéties, la résolution de l’intrigue… tout est assez convenu. Sur ce plan, je suis assez déçue parce que je m’attendais à la petite étincelle habituelle. Mais la surprise du chef n’est jamais venue.
Et très honnêtement, si le rythme est entraînant et que le roman se lit bien, je me suis un peu ennuyée tout de même. Parce qu’il ne se passe quand même pas graaaaand chose dans le fond. A mon sens, beaucoup de dialogues, de chamailleries et de blabla composent le roman. Alors certes, c’est agréable à lire, c’est parfois rigolo, j’ai beaucoup aimé voir tous ces perosnnages interagir ensemble. Mais j’ai eu la sensation que cela se faisait au détriment du récit. Qui met du temps à démarrer, d’ailleurs.
Bref, une intrigue qui ne m’a pas totalement comblée même si dans le fond, elle reste efficace.
Un univers steampunk de qualité
Qui se voit déjà à la couverture. Un peu trop graphique à mon goût, mais très bien réalisée, et soignée. Avec du brillant par endroits. A l’intérieur, ce sont des gravures qui parsèment le texte : publicités d’époque, extraits de journaux, scènes de genre… Un superbe travail éditorial jusque dans les bordures, petits dessins et en-têtes de chapitres. A noter : un double lexique en fin d’ouvrage. Un très beau pavé aux couleurs steampunk, avec un prix largement abordable. Suffisamment rare pour être souligné.
Dans le roman, l’univers est très bien construit. Cette fois, je n’ai pas manqué de détails sur les environs, la géographie de l’espace, l’historique de la ville. Le manque que j’avais ressenti dans Temps mort n’est pas apparu ici. Et pour cause : le roman grouille de détails. J’ai adoré arpenter les rues de Paris, et savourer toutes les trouvailles géniales de l’auteur.
Mention spéciale à tous ces personnages historiques dont les fonctions ici sont détournées. Ca c’était une très très bonne idée, très amusante, même si je ne suis pas sûre que le public plus jeune capte tout le sel de ces détournements.
Je regrette cependant que le personnage mi automate mi humain n’ait pas joué un rôle plus central. Il avait vraiment de quoi apporter quelque chose de dramatique au texte, lui donner une portée beaucoup plus forte. Il est question de lui tout au long du roman, mais il reste assez passif; on n’en saura jamais vraiment plus sur lui, et j’aurais aimé qu’il ait une présence plus palpable. Un peu comme certains personnages de Célestopol 1922, qui interrogent la frontière entre machine et humanité en nous offrant des passages emplis d’émotions. Or Pax Automata manque un peu d’émotions sur ce plan-là.
Une plume superbe
Première chose à souligner : la propreté du texte. C’est très lisible, aéré, et surtout, très bien relu. Je trouve que ça aussi, c’est suffisamment rare pour être souligné, d’autant que le roman s’adresse à un jeune public. Donc très important de ne pas truffer le texte d’horreurs.
J’ai eu plaisir à retrouver la plume d’Ariel Holzl, toujours aussi sonore et dynamique. Parfois amusée, même si j’ai moins ressenti son côté pince sans rire que j’aime tant, parfois mélancolique et touchante.
Le vocabulaire est riche, le phrasé pas trop simple, les dialogues soignés. C’est une très belle langue que nous offre encore l’auteur ici. Le mélange entre français et romaniciel donne du rythme, de la variété et énormément de musicalité au texte. J’ai adoré la maîtrise du rythme, le soin qu’il apporte à choisir le bon mot et trouver un joli effet. Je vous en laisse un passage pour vous en donner une idée.
« Le campement n’avait pas volé, hier. Mais tangué, ça oui ! Des mélodies capricieuses, arrachées du bout des ongles à des guitares. Des violons sautillants, lancinants, irrésistibles. Des gigues endiablées, à rendre sinistres les musettes de la place de la Nation Invaincue. Un ragoût délicieux, frémissant dans des chaudrons. Des visages accueillants, des yeux rieurs, des mains fouineuses d’enfants… Une liqueur traîtresse, plus sucrée qu’un bonbon. Des gaillards burinés, qui ne cessaient de leur en offrir dans de minuscules verres. Leurs sœurs, leurs cousines, leurs filles, leurs compagnes tourbillonnaient sur la piste. Une farandole de jupons fleuris qui ressemblaient à des pétales emportés par le vent. »
En pratique
Ariel Holzl, Pax Automata
Ecole des loisirs, collections M+, 2022
Couverture : Léonard Dupont
Autres avis : C’est très rigolo les différences de perception, car Tachan a trouvé que le roman était un tourbillon d’aventures entraînantes 🙂 Un avis très similaire au mien chez Ombre Bones. Maintenant, y’a plus qu’à vous faire votre propre avis !
Pax Automata : jouissif comme promis, ou pas ? Pax Automata est un excellent roman pour faire découvrir le steampunk au jeune public. Mais d’un autre côté, l’intrigue ne m’a pas semblé très recherchée. Très simple, efficace. Aucune tache, aucune faute majeure, mais je m’attendais à un peu plus de surprises, de prise de risques. Ariel Holzl signe avec Pax Automata un roman qui fonctionne bien, mais assez classique dans le fond. C’est un bon roman, mais pas brillant. Et c’est le problème avec les auteurs qu’on aime beaucoup lire et qui nous habituent à de l’excellent : on devient très exigeant !
Dommage qu’il n’y ait pas cette étincelle que l’on attend avec cet auteur mais l’univers a l’air intéressant et le côté classique ne me dérange pas tant que la plume est, comme celle de l’auteur, travaillée.
La plume est toujours un beau travail avec cet auteur, sur ce plan-là on n’est jamais déçu. C’est pour ça que je recommande tous ses textes à un public jeunesse et jeune ado ! Et oui, l’univers est vraiment chouette !
Ça a juste l’air de manquer d’une sœur Carmine pour venir un peu mettre le bazar quoi. 😁
Mais c’est EXACTEMENT ce à quoi je pensais en écrivant cette chronique ! C’est tout à fait ça oui 🙂
Merci pour le lien ! Je constate en effet qu’on partage le même avis 🤭 c’est dommage mais j’ai retrouvé l’étincelle de l’auteur dans la duologie des royaumes immobiles entre temps, ce qui m’a rassurée.
J’avais bien aimé le premier volume, et c’est pour cette raison (je me souviens de ton retour dessus) que je vais me précipiter ce week-end pour me le procurer ^^
Super ! Profite bien de ton WE à l’ouest hurlant 😊