Avis flash #20 spécial format court

Après la lecture pénible du Problème à trois corps (que j’ai mis sur pause, le bouquin traîne quelque part – non, c’est faux, disons plutôt que je vais faire semblant d’avoir oublié où je l’ai posé), j’avais besoin de rebondir. Pas évident avec l’actualité plus que plombante, un bon rhume bien épuisant et la tonne de boulot de la formation de correctrice que je suis. Bref, quelques pages lues seulement cette semaine, et bien péniblement. Malgré tout, le format court se prêtait fort bien à mon état et j’ai lu des textes ma foi sympathiques.
Au menu de cet avis flash #20 spécial format court :
– Sylvie Arnoux, Une fin en soie ;
– Nina Gorlier, Sous un carré d’immortelles;
– Robert Sheckley, La montagne sans nom;
– Robert Silverberg, Destination fin du monde.

Sylvie Arnoux, Une fin en soie

Voilà une autrice que je n’avais encore jamais lue. Elle écrit beaucoup pour la jeunesse. Une fin en soie est en revanche un texte destiné au lectorat adulte.

Résumé

Automne 1899. Peu après l’exécution de Joseph Vacher, le célèbre “tueur des bergères”, une série de disparitions projette à nouveau son ombre sur la capitale des Gaules. Léopold, journaliste pour la Gazette de Lyon, décide d’ouvrir l’enquête sur ce qui ressemble fort à l’œuvre d’un imitateur. Mais la vérité n’est jamais là où on l’imagine, et la curiosité de notre reporter pourrait bien l’amener sur des voies auxquelles il ne s’attendait pas…

Avis flash

Une bonne lecture, ma foi. J’ai bien aimé le cadre et le décor lyonnais à l’époque steampunk. C’est toujours risqué, le steampunk, ça a souvent tendance à n’être qu’un étalage de joujoux divers et variés. Pas trop de joujoux ici, et quelques aperçus d’un système global bien pensé, même si ce n’est pas non plus hyper développé. Mais le texte est très bien documenté sur l’industrie de la soierie lyonnaise et cet aspect-là était passionnant.

Le récit se tient, avec deux enquêtes menées en parallèle. Deux salles, deux ambiances : les secrets de la soie pour l’Exposition Universelle et un tueur de jeunes femmes. C’est assez intéressant, d’autant que l’autrice parvient à mener tout cela de front et en plus à apporter du contexte et de la consistance avec des flashback.

En revanche, soit je suis devenue super douée (j’en doute), soit c’était vraiment facile (plus probable) : j’ai tout deviné dès le début. De ce fait, je ne peux pas dire avoir été été emballée par un suspense fou. Chose plus embêtante, surtout : la fin est plus que rapidement expédiée. Je me demandais, à deux pages de la fin, comment diable l’autrice allait pouvoir boucler tout ça sans bâcler, ben, elle ne peut pas vraiment. J’ai eu l’impression de lire une situation finale résumée. Dommage.. Petit regret aussi sur la relecture, qui aurait pu être meilleure.

Nina Gorlier, Sous un carré d’immortelles

J’ai ramené cette novella publiée au chat noir des Imaginales, où elle figurait en avant-première. Je ne dis jamais non à un texte de Nina, dont j’aime beaucoup la plume, la poésie et la sensibilité.

Résumé

Médecin de campagne, Benedict Mercier reçoit une lettre d’une jeune femme gravement malade. Elle l’invite au sanatorium du Val d’Argent, souhaitant faire sa rencontre avant que la mort ne l’emporte. Intrigué, le jeune homme accepte de la rejoindre dans ce refuge perdu au cœur de la forêt, loin de ce monde dévasté par la guerre. Il souhaite en apprendre davantage sur la mourante qui prétend connaître Arthur, son amant parti au combat, dont il attend toujours le retour…
Mais très vite, Benedict s’aperçoit que ce sanatorium n’est pas comme les autres…

Avis flash

Pas déçue avec Sous un carré d’immortelles. J’ai retrouvé avec un grand plaisir la plume de l’autrice que j’aime beaucoup. Elle est à la fois douce et mélancolique, pleine de chuchotements et de piques amères. Le texte est bien relu dans l’ensemble, à la hauteur de la plume et du travail de l’autrice. C’est vraiment agréable à lire.

Nina nous dépeint une ambiance dont elle a l’habitude : des décors mystérieux et qui semblent à l’abandon, perdus. Des endroits où la nature semble reprendre ses droits, mais de manière dangereuse, avec un fond de magie étrange. Les personnages sont marqués par le deuil, la tristesse et la solitude, et on le ressent très bien dans la novella. Pour autant, il ne se dégage de ce texte aucune froideur, bien au contraire. Parce que ces personnages sont en demande, de ressentis, d’aventures. Il se crée alors une belle connexion entre eux et le lectorat.

Et puis il y a un côté poétique qui m’a plu, et qui m’a rappelé un peu le roman L’écume des jours de Boris Vian. Dans la symbolique des fleurs, dans le mal dont souffre Ophélia et dans la portée métaphorique du texte. J’aime beaucoup la manière dont l’autrice parsème ses textes de fleurs, et aussi l’utilisation qu’elle en fait. Ici, on est dans un texte aux colorations pastels, aux tons un peu délavés, avec des fleurs synonymes de mal et qui s’épanouissent davantage dans des bouquets séchés que fraîches. Sous un carré d’immortelles raconte le deuil, la perte d’un être cher mais surtout la permanence d’un amour d’une manière qui a su me toucher.

Robert Silverberg, Destination fin du monde

Résumé

Pour la suite de cet avis flash #20, deux nouvelles que j’ai emmenées des Utopiales. Ces deux textes figurent dans la collection Dyschroniques des éditions du passager clandestin. J’avais déjà lu et beaucoup aimé Traverser la ville du même auteur et publié dans la même maison. Retrouvailles avec Silverberg dans ce petit texte.

Dans un avenir proche, des jeunes couples friands de divertissements en tous genres sont réunis à l’occasion d’une soirée. Au centre des discussions, une distraction inédite tout juste expérimentée par la plupart d’entre eux : les agences de voyages temporels proposent désormais une nouvelle destination. En trois heures de temps, il est possible d’aller assister, à bord d’un vaisseau, à la fin du monde. Mais, les récits des voyageurs ne concordent pas…

Avis flash

On est en 1972, et en quelques pages l’auteur nous dresse un panorama grinçant de l’Amérique profonde de l’époque. Imaginez des familles WASP de l’époque dans une ville du style Wisteria Lane. C’est exactement ça : il faut prouver à son voisin qu’on a mieux que lui. On y voit les dessous de l’American way of life, le bonheur des parfaits petits couples de l’époque qui ont un peu d’argent.

Quelques pages pour une seule scène, le temps d’une soirée qui réunit tous ces couples, et un seul mot : vanité. Que tout cela est vide, creux, pauvre. Les personnages, leurs relations, leurs rêves, leurs passions… tout ça se caractérise par un vide intersidéral. Les personnages sont une ribambelle, on n’a même pas le temps de retenir leur prénom (hyper classique) et de toute façon, il n’y a que cela pour les distinguer. Donc on a l’impression d’avoir affaire à des clones.

Derrière cela, on a cette nouvelle attraction touristique : la fin du monde. Complètement fumée et fantasmée, totalement bidon, si vous voulez mon avis. C’est une fin du monde en carton-pâte, parfaitement adaptée aux nanars ou aux bouquins de divertissement à deux sous. Cela peut prêter à sourire, mais pas longtemps; car la fin du monde, elle est là, en fait. Autour des personnages. Qui ne s’en rendent même pas compte. Le décalage entre leurs fantasmes de riches blancs qui s’ennuient et le monde réel dans lequel ils vivent est énorme, et la manière dont l’auteur balaie ça en même temps que ses personnages le rend encore plus flagrant.

Un texte percutant, très réussi, du fait de son récit très détaché au ton presque monocorde et désintéressé et des dialogues vides. Et d’autant plus percutant que ce texte a, à bien des égards, de frappantes ressemblances avec notre société aujourd’hui. Je vous laisse découvrir cette nouvelle pour vous en rendre compte… !

Robert Sheckley, La montagne sans nom

Résumé

Plusieurs milliers d’hommes et de machines étaient déjà sur la planète et au commandement de Morrison, ils se disperseraient, supprimeraient les montagnes, raboteraient des plaines, déplaceraient des forêts entières, modifieraient le cours des rivières, fondraient les calottes glaciaires, façonneraient des continents, creuseraient des mers nouvelles, bref, accompliraient tout ce qu’il faudrait pour que le Plan de Travail 35 devienne un centre d’accueil favorable à la civilisation technologique unique et exigeante de l’homo sapiens.

Avis flash

Et dernier retour sur cet avis flash #20 : une nouvelle de Robert Sheckley. Qui décidément, ne me convainc pas. J’ai lu récemment Deux hommes dans les confins, et franchement je n’ai pas trouvé ça dingue. Oui c’était rigolo, mais le comique de répétition m’agace un peu, et je n’ai pas trouvé que ça cassait trois pattes à un canard, très honnêtement. D’ailleurs, je n’en ai pas fait de chronique (et n’en ferai pas, le temps étant une denrée rare, je l’économise !).

D’abord, l’écriture de l’auteur ne me séduit pas. Elle n’est pas mauvaise, mais elle n’a rien d’extraordinaire. Je la trouve assez commune. Si c’est parfait pour raconter des petites histoires divertissantes qui soient comprises par toutes et tous, ça me transporte moins, en revanche.

Ensuite, le schéma de cette nouvelle est très classique; 5 petites étapes bien dans l’ordre, on dirait un exercice d’école. Ça marche et c’est efficace, vous me direz. Certes, mais bon, côté originalité et surprise, bof bof.

Et surtout, c’est du déjà-vu. Là encore vous me direz que le texte date de 55. Oui, effectivement. Certainement est-ce pour cette raison que les thématiques du colon blanc et puissant qui arrive sur une planète pour tout détruire et s’installer, de la loi du plus fort qui compte et du pauvre indigène maltraité n’ont pas provoqué grand-chose chez moi. Le coup de la planète qui se retourne contre son oppresseur non plus. Pour le coup, je trouve que les chroniques martiennes par exemple sont beaucoup plus intéressantes et elles datent de 50. La manière dont Bradbury traite ces sujets est beaucoup plus fine, cocasse et maligne.

Enfin, je disais qu’Une fin en soie était express, là c’est même plus express c’est carrément torché. Et je n’ai même pas trouvé la fin crédible tant elle arrive comme un cheveu sur la soupe et que ça ne tient pas trop. Dommage parce que l’originalité, elle est là, justement. Mais bon, à peine évoquée que hop, la nouvelle est finie.

4 retours très flash, comme vous l’aurez remarqué ! Un peu compliqué ces temps-ci, et vous aurez remarqué aussi que je n’ai plus le temps non plus de venir commenter vos publications (même si je vous lis malgré tout), ni de publier newsletter et premières lignes du dimanche. Ce n’est que passager, je suis obligée de prioriser en ce moment ! J’espère en tout cas que vous aurez pris plaisir à lire ce nouvel épisode d’avis flash #20, et j’espère vous retrouver pour une chronique longue bientôt !

3 commentaires sur “Avis flash #20 spécial format court

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  1. Pas toujours facile de tenir le rythme, je suis bien d’accord. Et dans ce cas-là, les récits courts sont une bénédiction. Je fouille mes étagères, en ce moment, pour les mêmes raisons que toi. Mais j’ai surtout en stock des pavés. Et ça n’avance pas vite quand on ne peut lire que quelques pages chaque jour.
    À bientôt pour de prochaines aventures / lectures.

    1. Hé oui, c’est exactement ce que je me dis maintenant, le stock de formats courts diminue, que vais-je donc me mettre sous la dent les jours prochains ? Je n’ai pas l’énergie pour ouvrir un pavé, là…

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